Fécondité, longévité

La lecture des registres de la paroisse de Borso est riche d’enseignements, outre ceux qui concernent strictement l’état civil. Pour les adultes, les prêtres y indiquaient par exemple assez souvent la cause du décès. Je me suis livrée à quelques analyses au sujet de l’ascendance agnatique de mon père, pour laquelle je dispose de bon nombre de certificats paroissiaux de baptême ou d’inhumation.

Fécondité
Nombre moyen d’enfants par couple, par période

Le graphique ci-contre montre que la fécondité est très élevée dans la période 1700-1724, puis baisse de manière importante.

Nombre moyen d’enfants morts en bas âge, selon la période et l’âge de décès

 

 

Mais les enfants morts à la naissance ou en bas âge sont également très nombreux.

Malgré une natalité assez élevée, chaque génération ne produit donc pas un grand nombre d’adultes susceptibles d’avoir eux-mêmes des enfants.

Certains couples sont particulièrement touchés par la mortalité infantile :

* Parmi les 15 enfants de Francesco Vedovotto et Maria Ziliotto, 7 meurent avant d’avoir eu un an et 1 meurt à six ans
* Parmi les 11 enfants de Giovanni Vedovotto et Maria Mogno, 7 meurent avant d’avoir eu un an
* Parmi les 11 enfants de Antonio Vedovotto et Teresa Andreatta, 3 meurent avant d’avoir eu un an et 2 entre un et cinq ans. Ce couple aura même la douleur de perdre deux enfants à trois jours d’intervalle, frappés par une épidémie de coqueluche.
* Aucun des 5 enfants de Francesco Vedovotto et Giulia Ziliotto n’atteindra l’âge adulte

Cet histogramme des décès en bas âge montre lui aussi à quel point la fin du XVIIIe siècle et le XIXe siècle auront été difficiles entre Brenta et Piave.

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Longévité, causes de décès

 

longévité moyenne, selon la période

La longévité augmente régulièrement puis se maintient jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, avant de subir une baisse notable. Dans la période 1800-1824, elle chute à une moyenne de 56 ans. A l’aube du XXe siècle, elle n’a pas retrouvé la valeur qu’elle avait dans la première partie du XVIIIe siècle. La dégradation des conditions de vie des Vénitiens ruraux dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et surtout au XIXe siècle transparaît derrière cet histogramme.

Les principales causes de décès

Les mentions indiquées par les prêtres à certaines époques m’ont permis de relever certaines causes de décès récurrentes. Cette analyse est bien sûr tributaire de la fiabilité des diagnostics énoncés :
* le scorbut : entre 1745 et 1812, 5 membres des diverses branches de la famille Vedovotto sont répertoriés comme étant décédés des suites de cette carence en vitamine C, à des âges variant entre 30 et 70 ans.
* la pellagre : cette maladie est également due à une carence nutritionnelle. Elle atteint les populations qui consomment peu de vitamine B3, en particulier celles dont le régime alimentaire est essentiellement constitué de maïs. Là encore, j’ai relevé 5 décès clairement attribués à ce motif, entre 1850 et 1878. Cette maladie est symptomatique de la situation économique des populations rurales de l’époque, qui ne pouvaient plus se nourrir correctement, et a contribué à inciter de très nombreuses personnes à émigrer au XIXe siècle.
* le choléra : en 1836 puis en 1855, la ville de Borso a été atteinte par le choléra. Francesco et Domenico Guadagnin, deux frères, en meurent à un jour d’intervalle les 21 et 22 juillet 1836. Durant l’été 1855, Domenico Fabbian et Giacomo Rech en décèdent à leur tour. Leur acte d’inhumation stipule qu’ils ont été enterrés sans cérémonie funéraire.
* la coqueluche : en janvier 1910, cette épidémie semble avoir durement touché les enfants de Borso. J’ai relevé trois décès dans mon arbre en l’espace de vingt jours.
* les décès en couche : fausses-couches, accouchements fatals à la mère et parfois aussi à l’enfant, sont signalés à plusieurs reprises par les prêtres.
* les atteintes pulmonaires : “bronchite, œdème pulmonaire, pleurite, pneumonie, toux catarrhale” sont des termes cités de manière récurrente. En absence d’antibiotiques, ces pathologies devenaient fatales.
* les infections diverses : sans que la cause exacte ne soit mentionnée, certains membres de ma généalogie sont déclarés morts des suites d’une fièvre, parfois qualifiée de “maligne”, d’inflammations (male inflammatorio, inflammazione) ou d’une infection plus précise (cancrena, angina).
* l’apoplexie : ce qui serait qualifié aujourd’hui d’accident vasculaire cérébral a été mentionné dès 1730
* le cancer : apparu plus récemment dans les certificats d’inhumation (au XXe siècle)
* les arrêts du cœur : ce que les prêtres dénomment paralisi cardiaca ne peut cependant pas réellement être considéré comme la cause du décès, sauf s’il s’agit d’une crise cardiaque (improvisamente, per paralisi cardiaca).